vendredi 28 avril 2017

Nûn


Dans l'introduction de son livre "La Porte de Nûn", H. Nur Artiran écrit:



"Dans la Sourate "Le Crayon  (ou la Plume), Dieu Le Très-Haut prête serment en  disant : "Nûn! Par le crayon et ce qu'ils écrivent!" Nûn est une lettre arabe, et le crayon l'instrument pour écrire que tout le monde connaît. La réalité est qu'à aucun moment Notre Haut Créateur ne prêtera serment sur une existence périssable et passagère. Car cela ne conviendrait pas à sa Magnificence.  Allah Le Permanent, L'éternel, ne peut jurer que sur ce qui est permanent. C'est la raison pour laquelle la lettre NUN dont il question dans le Verset représente, entre autre,  l'état dans lequel se trouve un être humain  lorsqu'il est en position de prosternation dans la prière. Quand à la dimension réelle de cet état de prosternation dans le Namaz (prière rituelle), c'est de n'être RIEN, d'être tout entier modestie et abnégation. Car dans le monde Réel (de la Vérité), il n'est pas possible de se mettre prosternation sans être dans la compréhension et la conscience de n'être Rien face à Notre  Créateur.  Quand à la prosternation, il s'agit de  mélanger le corps avec la terre à partir de laquelle celui-ci a été créé. C'est un signe, une indication de l'état de mort avant la mort. C'est pourquoi il ne peut y avoir de crayon sans venir à la Porte de NUN avec AMOUR . Quand au but de l'existence (la citation) de ce crayon: comme cela a été expliqué dans Hadith Qudsi: " Si J'aime un serviteur, Je suis l'œil par lequel il voit, l'oreille par laquelle entend, la main par laquelle il tient, la langue par laquelle il parle. Désormais il entend par Moi, voit par  Moi, prend par Moi et marche par  Moi." Il s'agit de vivre ce Hadith Qudsi dans son sens réel, de se préserver de l'apparence et de la forme et de s'en remettre à ce qui est sans apparence et sans forme. C'est là que prend place (Ayets 27 à 30 ) à la Sourate El Fajr (89): "Ô toi, âme apaisée, retourne vers ton Seigneur, satisfaite et agréée; entre donc parmi Mes serviteurs, et entre dans Mon Paradis".


“La Beauté sans pareil de l’acte de miséricorde et de pardon”

Interview  dans la Revue “Reflets” du 29 Mars 2016 de H.Nur ARTIRAN, Présidente de la Fondation internationale  Şefik Can  de l’Enseignement et de la Culture Mevlânâ Rûmî,  par Christian et Thérèse ROESCH . 





Pouvez-vous tout d’abord nous expliquer la racine étymologique des concepts de “miséricorde et de pardon” et la manière dont ces concepts sont utilisés dans l’Islam ?

Le concept de “miséricorde” a pour racine étymologique le mot arabe “reheme” et signifie “prendre en pitié, montrer de la commisération, de la compassion, pardonner”. Les attributs du Créateur Suprême “Rahman” (“Le Miséricordieux”) et “Rahim” (“Celui qui fait miséricorde”) ont également la même racine étymologique, et par voie de conséquence, le mot “merhamet” (“compassion”) a le même sens que le mot “rahmet” (“miséricorde”), et apparaît à cent quatorze reprises dans le Coran. Alors que les versets coraniques qui ont directement trait à “l’acte de pardonner” sont au nombre de deux cent trente-quatre, ceux qui concernent le “fait de châtier” sont au nombre de cent dix-sept. En d’autres termes, le concept de “faire acte de pardon” tient dans le Coran une place bien plus importante que celui de “châtier”. 

En outre, l’un des Noms de Dieu qui est le plus répété dans le Coran est celui “Gafûr” qui signifie “Celui qui pardonne”. Tandis qu’il est dit dans un verset coranique : “Ô Muhammad ! Fais savoir à Mes serviteurs que Je suis Celui qui Pardonne, le Très-Miséricordieux !”, le verset 107 de la sourate Les Prophètes énonce en faisant référence au Prophète Muhammad :“ Nous t’avons seulement envoyé comme une miséricorde pour les mondes.” C’est-à-dire : ‘ Nous t’avons envoyé comme un prophète faisant preuve de miséricorde, de compassion, d’amour et de pardon envers tous les êtres créés.’ Ainsi, dès lors que l’on appréhende les concepts de “miséricorde et de pardon” dans une perspective islamique, il est possible de percevoir directement ou indirectement dans les versets coraniques cet appel Divin et de ressentir toujours ce sentiment humain dans les profondeurs des versets. 

Un jour, David demanda au Créateur suprême : ‘Pourquoi as-Tu crée ce monde et les hommes’. Dieu répondit : “J’étais un Trésor caché, J’ai voulu être connu et être aimé”. Ainsi, tout le “secret” de la manifestation de l’univers et de l’humanité est dissimulé dans cette sentence Divine: “J’étais un Trésor caché, J’ai voulu être connu et être aimé”. Il convient de chercher et de trouver le fondement de la pensée islamique, sa réalité intérieure et son essence dans ce “Trésor caché”. Notre Seigneur veut être connu, mais Il veut être connu en étant aimé et non pas en étant craint ! C’est là un point fondamental et profond. Autrement dit, le premier pas de la connaissance de Dieu et de la proximité avec Lui est de L’aimer, et partant, de faire preuve d’amour, de respect, de compassion et de miséricorde envers tous les êtres qu’Il a crée. Tant que nous n’aimons pas tous les êtres créés par Dieu et que nous ne faisons pas preuve de respect à leur endroit conformément au but de leur création, il est absolument impossible ni d’aimer Dieu et Ses prophètes, ni de comprendre véritablement le Livre révélé, ni même d’incarner dans notre vie convenablement ce que nous avons compris. Dans l’un de ses distiques, Mevlânâ dit : “La science de la connaissance de Dieu n’a été octroyée qu’aux amoureux de Dieu, et non à ceux qui sont intelligents”. Cela veut donc dire que nous ne pouvons posséder de l’amour, de la compassion et de la miséricorde envers les créatures de Dieu qu’à proportion de l’amour Divin qui habite notre cœur.

Sans nul doute, le facteur essentiel d’une vie vécue humainement réside dans le fait d’être doué d’amour, de compassion et de miséricorde. En outre, c’est d’être à même, lorsque les circonstances l’exigent, de s’éloigner des ressentis et des pensées négatifs de nature infernale tels que la haine, la colère, la concupiscence, la jalousie, l’inimitié, et d’être celui qui pardonne, qui aime et qui protège. C’est là, en effet, la voie et la parole de tous les prophètes et non pas seulement celle du Prophète Muhammad. Prétendre le contraire, c’est ne pas comprendre le sens profond des messages divins des prophètes.  

Vous dites que l’amour, la compassion et la miséricorde représentent la voie et la parole de tous les prophètes et non pas seulement celle du Prophète Muhammad ? Comment peut-on dès lors expliquer cette négativité ambiante qui a cours dans notre monde ? 

Tous les prophètes, depuis Adam jusqu’à Muhammad, n’ont eu de cesse de montrer à leur communauté la voie du bien et du beau en leur parlant de l’unité de l’humanité, de la fraternité, de la paix et de l’indulgence. Le véritable problème ne réside ni dans la religion, ni dans les prophètes, ni dans le système de croyance qu’ils s’évertuèrent de diffuser. Le véritable problème réside dans leur communauté incapable de comprendre véritablement leur prophète; l’imperfection tire sa source dans les pensées et les conceptions des hommes qui comprennent de manière erronée et déficiente leur religion. Si toutes les communautés avaient pu comprendre pleinement leur propre prophète et vivre tel qu’ils l’ont souhaité, il va de soi qu’il n’y aurait pas eu en ce monde tant de haine, de colère et de guerres. Dès lors qu’on analyse la racine profonde des guerres, on peut aisément se rendre compte que tous ces événements inhumains ne sont rien d’autre que des querelles de religion et de pensées. Pourtant, tous les prophètes enjoignent de respecter de manière absolue les droits d’autrui, leur mode de vie et de croyance. Jésus exprima cette même idée lorsqu’il s’adressa à sa communauté en ces termes : “Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous ? Les publicains aussi n’agissent-ils pas de même ? Et si vous saluez seulement vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? Les païens aussi n’agissent-ils pas de même ?”  “Vous avez entendu qu’il a été dit : tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi.Mais moi, je vous dis : aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent” (Matthieu, 43-44). A l’instar des prophètes, tous les saints n’ont eu de cesse de semer en ce monde les graines d’amour, de respect, d’amitié, de fraternité et d’unité. Du reste, il est inimaginable de concevoir différemment ces êtres d’exception qui sont dotés de la foi véritable. Il est inconcevable que ces êtres, qui vivent à la lumière de ces vérités Divines intemporelles, puissent avoir des problèmes avec quiconque, et ce quelque soit par ailleurs leur religion et leur mode de pensée. 

Par ailleurs, le concept de “foi” revêt un caractère primordial dans tous les systèmes de croyance. Toutes les religions révélées reconnaissent l’existent de la mort et de l’au-delà, et partant, du paradis et de l’enfer. En général, le but ultime poursuivi par les adeptes de la religion est d’entrer au paradis et d’éviter l’enfer. On pourrait, bien évidemment, se demander dans quelle mesure une telle piété est pertinente, mais c’est là un tout autre sujet ! Cependant, nous souhaitons insister avec force sur un hadîth du Prophète Muhammad : “Vous n’entrerez pas au paradis tant que vous ne croirez pas, et vous ne croirez pas tant que vous ne vous aimerez pas. ” On peut aisément se rendre compte que le préalable de l’entrée au paradis réside dans l’amour et le le respect des uns envers les autres. Il s’ensuit donc que celui qui aime les autres, qui les pardonne, et qui fait preuve de respect envers leur mode de vie et de croyance est doté de la “véritable foi”. 

Dans ce contexte, y-a-t-il des différences d’approche entre les religions sur ce point ? Que pouvez-vous nous dire sur la foi des musulmans envers tous les prophètes et les Livres qui leur furent révélés ?

Le système de croyance Seigneurial qu’on nomme “religion” représente uniquement le bien, le beau et le juste. A l’image des êtres, la religion est également amenée à naître, à croître et à atteindre au cours du temps un degré de perfection ultime. Ainsi, la miséricorde, le respect et l’amour qui sont dus envers les êtres créés dans le cadre de la “religion” ont atteint leur apogée avec l’Islam. C’est la raison pour laquelle le Prophète Muhammad a dit : “J’ai été envoyé afin de parachever les nobles caractères de l’homme.” C’est-à-dire : ‘J’ai été envoyé en tant que prophète en vue de parfaire toutes les beautés Divines préexistantes !’ Si l’on examine les choses en toute objectivité, sans préjugés, et en étant mû par des pensées et des ressentis purs, on pourra voir sans grande difficulté, tant dans les versets coraniques que dans les dits du Prophète que la miséricorde, le pardon, l’amour et le respect d’autrui ont toujours été au premier plan. Car les lois Divines que nous appelons “religion” n’ont de sens que si elles nous servent à incarner dans notre vie la justice, l’amour, la compassion, la miséricorde et l’unité absolue dans la multiplicité. Dieu est “un” et Il veut voir les serviteurs qu’Il a créé dans cet état d’unité, “d’Unicité divine ”. C’est pourquoi la dualité n’est acceptée par aucun système de croyance. La religion n’est nullement la propriété des prophètes, mais celle de DIEU. Les prophètes, quant à eux, ont la responsabilité de diffuser sur terre les nobles commandements Divins qui émanent de Dieu. C’est pourquoi la personnification des religions et la discrimination opérée entre les prophètes sont le propre des gens ignorants ; c’est là une manière erronée de concevoir les choses. Il importe également d’admettre que la religion n’est nullement un but en soi, mais un moyen Seigneurial en vue d’atteindre ce qui est le meilleur, le plus beau et le plus juste. “L’essence” et la “réalité intérieure” de la religion est une. Ce qui semble à première vue comme une différence ne porte, en fait, que sur l’apparence, la forme, la surface et l’écorce des choses, afin que les commandements du Créateur suprême soient en adéquation avec les conditions de l’époque. Pour cette raison, la sujétion à l’apparence et à la forme du fait religieux est non seulement une forme d’idolâtrie, mais s’avère en plus une cause d’éloignement de l’essence de la religion, et de l’amour Divin du “Maître du Jugement Dernier”. Conformément à un verset coranique, cette situation traduit une ruse du Démon visant à tromper l’homme au moyen de Dieu, et il est extrêmement difficile pour un homme tombé dans ce puits noir sans fond de s’en extraire.

Tandis que le verset 48 de la sourate La Table servie énonce : “Ô Muhammad, Nous t’avons révélé le Livre et la Vérité pour confirmer ce qui existait du Livre, avant lui, en le préservant de toute altération. Juge entre ces gens d’après ce que Dieu a révélé. Ne te conforme pas à leurs désirs en te détournant de ce que tu as reçu de la Vérité. Nous avons donné à chacun d’entre eux une règle et une Loi. Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu’Il vous a fait. Cherchez à vous surpasser les uns les autres dans les bonnes actions. Votre retour à tous se fera vers Dieu. Il vous éclairera, alors, au sujet de vos différends.”, il est dit dans le verset 8 de la sourate La Délibération :“Si Dieu l’avait voulu, Il aurait réuni tous les hommes en une seule communauté.” et dans le verset 93 de la sourate Les Abeilles : “Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Il vous sera demandé compte de ce que vous faisiez!”. Le verset, ‘Il vous sera demandé compte de ce que vous faisiez’ signifie dans ce contexte, ‘il vous sera demandé compte de la dualité dans laquelle vous êtes tombés’. Car il est dit explicitement, ‘Si Nous l’avions voulu, Nous aurions fait de vous une seule communauté; -c’est-à-dire une communauté pourvue d’une seule croyance - mais Nous ne l’avons pas fait, Nous avons voulu vous éprouver’. Le verset 136 de la sourate La Vache dit la chose suivante quant à la dualité dans laquelle les musulmans tombent sur ce point : “Dites : Nous croyons en Dieu, à ce qui nous a été révélé, à ce qui a été révélé à Abraham, à Ismaël, à Isaac, à Jacob et aux tribus ; à ce qui a été donné à Moïse et à Jésus ; à ce qui a été donné aux prophètes de la part de leur Seigneur. Nous n’avons de préférence pour aucun d’entre eux ; nous sommes soumis à Dieu”. Ce verset montre que la foi des musulmans envers tous les prophètes et les Livres qui leur ont été révélés est une exigence absolue de la religion.

Que faut-il entendre par le fait de revêtir les caractères de Dieu ? Pouvez-vous nous expliquer le lien que ce sujet peut avoir avec “la miséricorde et le pardon” ?

Dans l’un de ses hadîths, le Prophète Muhammad a dit : “Revêtez les caractères de Dieu.”. Qu’est-ce que le caractère de Dieu ? C’est le fait de mener, consciemment et sincèrement, une existence en étant immergé dans les profondeurs du sens spirituel infini de Ses plus beaux Noms. Considéré dans cette perspective, le trait de caractère majeur le plus notable de Dieu réside dans le fait qu’Il est Celui qui pardonne. Pour cette raison, le verset 53 de la sourate Les Groupes énonce : “Ô mes serviteurs ! Vous qui avez commis des excès à votre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde de Dieu. Dieu pardonne tous les péchés.” Un homme peut donc avoir perdu toute son humanité et avoir dépassé la mesure, mais Dieu dit néanmoins : “Ne désespérez pas de la miséricorde de Dieu, Dieu pardonne tous les péchés.” On a pu dire qu’il s’agissait là, au sein de tous les Livres révélés, du verset qui donne le plus d’espoir à l’homme et qui montre ostensiblement le Pardon infini de Dieu. Toutefois, face à cette parole qui révèle le pardon illimité de Dieu, l’homme ne doit pas commettre des excès et perdre son humanité en se disant ‘De toute façon, Dieu pardonne tout’ ; il se doit au contraire, comme le dit si bien le Prophète Muhammad, revêtir les caractères de Dieu en faisant montre lui-même de pardon, de compassion et de miséricorde même dans les situations les plus difficiles. Chaque être humain possède immanquablement des défauts, des déficiences et des imperfections. Si nous voulons que nos fautes et nos défauts soient pardonnés par Dieu, il faut à tout prix que nous fassions nous aussi preuve de pardon. De fait, il est inconcevable qu’un homme qui ne sait pas pardonner puisse lui-même être pardonné, ou qu’il soit fait miséricorde à un homme dépourvu de miséricorde. La cause de la révélation du verset 22 de la sourate La Lumière est à cet égard particulièrement significative. Il y est question d’une situation telle qu’il semble à première vue impensable de pardonner. Mais, même en pareille circonstance, Dieu Le Très-Haut dit à Ses serviteurs à l’occasion de cet événement : “Ceux qui, parmi vous, jouissent de sa faveur et de l’aisance ne négligeront pas de donner à leurs proches, aux pauvres et à ceux qui émigrent dans le chemin de Dieu. Ils oublieront et pardonneront. N’aimeriez-vous pas que Dieu vous pardonne ? Dieu est Celui qui pardonne, Il est miséricordieux.” Ce verset nous demande clairement de faire preuve de compassion, de miséricorde et de pardon, tout au moins si nous voulons que Dieu nous fasse également miséricorde et nous pardonne. Dans le verset 44 de la sourate Taha, il est dit à Moïse : “Allez à Pharaon, il est rebelle; adressez-lui des paroles courtoises; peut-être réfléchira-t-il, ou éprouvera-t-il de la crainte ?” Le verset en question fournit une illustration particulièrement éloquente quant à la manière de nouer des relations avec les autres. Il y est dit que l’on doit communiquer d’une manière courtoise et élégante même à l’encontre de Pharaon qui est pourtant allé très loin dans l’infidélité, la rébellion, au point de s’autoproclamer une divinité. Et le verset 34 de la sourate Les versets clairement exposés énonce : “L’action bonne n’est pas semblable à la mauvaise. Repousse celle-ci par ce qu’il y a de meilleur : celui qu’une inimitié séparait de toi deviendra alors pour toi un ami chaleureux”. Tous ces versets expriment d’une manière patente qu’il nous est demandé de réagir aux mauvaises actions par de bonnes actions et de tenter de remédier au mal par l’entremise d’une relation courtoise et élégante. Le Prophète Muhammad a dit à ce propos : “Aidez aussi bien l’homme de bien que l’homme mauvais.” Les Compagnons lui demandèrent alors : “Nous comprenons l’aide que l’on peut faire à l’homme de bien ; mais comment peut-on aider l’homme mauvais ?” ; le Prophète répondit: “En l’éloignant du mal et en l’aidant à devenir un homme de bien .” On pourrait, bien évidemment, multiplier ces exemples. La quintessence de tous ces propos est la suivante :  il convient d’aider les gens en s’efforçant de soulager leurs peines, leurs douleurs et leurs souffrances ; il s’agit de faire don, ne serait-ce que l’espace d’un instant, de bonheur, de paix, d’espoir et de joie. Et le point le plus important, c’est de faire tout cela sans faire aucunement de discrimination entre la race, la langue, la religion et le mode de pensée des gens. 

Pour finir, pouvez-vous nous expliquer comment un être humain doté d’une véritable miséricorde et d’un véritable pardon se doit-il de se comporter ?

De nos jours, toute personne interrogée affirmera, la main sur coeur, qu’elle est remplie d’amour, de compassion et de miséricorde. Si ces sentiments étaient sincères et reflétaient bien un amour, une compassion et une miséricorde véritables, il n’y aurait pas eu en ce monde tant de souffrances, de douleurs et de larmes. Il y a peut-être bien de l’amour, de la compassion et de la miséricorde dans le coeur des gens, mais c’est là un sentiment déficient et infirme. Chacun porte dans son coeur de l’amour, de la compassion et de la miséricorde envers celui qui lui ressemble, envers celui qui pense comme lui et qui partage sa croyance. Est-il concevable qu’un telle compassion et miséricorde égoïstes, unilatérales et intéressées puissent apporter la paix et la joie à notre monde ? Laissons-là le monde ! Est-il même concevable que cela puisse procurer à l’homme lui-même une paix et une joie de l’esprit ? De fait, l’homme sera amené à éprouver en lui-même du bien-être et de la paix à la mesure de l’amour, de la compassion et de la miséricorde qu’il fera montre envers les autres. C’est là une approche foncièrement fausse que de penser que de l’amour, la compassion et le pardon que l’on montre envers autrui est un bien que l’on prodigue à la partie en face. Ces pensées d’humanité procurent d’abord du bonheur et de la paix à ceux qui incarnent dans leur vie ce noble caractère. Car toute pensée ou ressenti négatifs constitue un lourd fardeau pesant sur l’esprit de l’homme. Il est absolument impossible qu’une personne puisse trouver en lui-même la paix, le bonheur et surtout la “liberté” aussi longtemps que ces éléments négatifs ne sont pas dissipés en lui. Ce qui importe, ce n’est pas la liberté du corps, mais celle de l’esprit. Tant que l’esprit d’un homme demeure prisonnier de ressentis tels que la haine, la colère, la jalousie ou encore l’inimitié, il est proprement impensable qu’il puisse éprouver la paix, la légéreté, le bonheur et la liberté véritables. L’amour qui est agréé par le Divin est celui qui consiste à aimer celui qui n’aime pas et à donner à celui qui ne donne pas. A l’inverse, le fait de montrer de l’amour, du respect et de la miséricorde uniquement à ceux qui nous ressemblent, de n’aimer que ceux qui nous aiment et de donner qu’à ceux qui nous donnent ne peut en aucun cas être considéré comme de l’amour et de la générosité. C’est là seulement un échange commercial. C’est pourquoi Jésus a dit dans l’Evangile : ‘Si vous agissez ainsi, quelle différence y-aura-t-il entre vous et les publicains ou les idolâtres ?’. L’amour et le respect sont donnés sans attendre aucune contrepartie en retour. Dans cette perspective, Ali, un des proches du Prophète Muhammad a dit: “Pourquoi attends-tu une contrepartie sous prétexte que tu as fait preuve de respect ou de pardon envers quelqu’un ? Cette attitude provient du respect que tu as envers toi-même. Il est donc inopportun d’attendre une quelconque contrepartie en retour.” Etant donné qu’un tel amour sans contrepartie est le propre du Créateur suprême et des serviteurs qui Lui sont proches, le verset 92 de la sourate Joseph énonce : “Dieu est le plus miséricordieux de ceux qui font miséricorde.”. Car le miséricorde de Dieu n’est nullement une miséricorde égoïste et intéressée. Il s’ensuit donc que l’imitation de l’amour, de la compassion et de la miséricorde est non seulement dépourvue de valeur aux yeux de Dieu, mais, qui plus est, ne contribue ni à notre bonheur et bien-être, ni à celui de la société. 

* Autre interview de H. Nur Artiran dans “Le Monde des Religions: Ici



lundi 24 avril 2017


Entretien spirituel du 23 Avril à Sultanahmet. (notes)



Sohbet de notre Vénérable Maître du 23 Avril à Sultanahmet. (notes)




" Quelle belle journée que cette journée du Miraj (Miraç : Ascension du Prophète)...
Nous avions une très belle histoire d'amour non terminée.. Hz Mevlânâ dit: cette histoire est la votre. C'est aussi l'histoire de votre ascenssion au Miraj..
Nous espérons terminer cette histoire aujourd'hui. Mais comme vous le savez, Celui qui se manifeste c'est Dieu, et nous nous conformons à Lui..
(Prières, et salutations au Prophète)
Quelle belle journée de Kandil !
( Kandil: bougie, lanterne, allumée toute la nuit autrefois dans les mosquées, pour les fêtes religieuses, dont celle de l’ascension du Prophète. Par extension, "Kandil" est le nom donné à l'événement sacré célébré la nuit.)
Şems-i Tebrizi a dit:
"Je dis à la communauté de Muhammed: lorsque notre Prophète fait l'ascension, que toute la communauté de Muhammed la fasse derrière lui!"
Nous pourrons comprendre la vérité de ces paroles, inchallah, et cela sera possible pour nous tous de la vivre. 
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Cette histoire est notre histoire; qu'avions-nous dit? (Notre Maître reprend l'histoire depuis le début en la résumant).
Le Padîshah, c'est notre âme (Ruh). L'esclave, Cüz-i Akıl, l’intelligence ou raison partielle, notre nefs. 
 L'esclave est malade parce qu'elle aime quelqu'un d'autre;ainsi, une personne sent parfois qu'elle s'est trop bien conformée à son nefs, qu'elle est trop loin de la réalité.  Elle cherche un remède. L'âme est très malheureuse:le Pâdishah demande l'aide de médecins; ceux -ci n'ont pas dit "inchaallah", ce sont des maîtres d'imitation. Puis le Padishah trouve une solution en pleurant, en courant vers la mosquée pour prier, après avoir enlevé ses chaussures (cela est très important) . Il s'endort et voit un rêve, ou plutôt un songe, ce n'est pas pareil. Il s'agit d'autre chose, c'est un songe spirituel éveillé. Un "médecin"" arrive et il court vers lui, le sert fort contre lui, et lui dit: c'est toi mon véritable Bien-Aimé.
💚
Le médecin dit qu'il trouvera une solution. "Videz le palais". Nous avons dit que cela signifiait se vider de ses pensées, opinions, égo, nefs, etc.. ce n'est pas facile! 
La relation entre le médecin et l'esclave: il s'agit (aussi) de la relation du Maître avec son disciple (à ses débuts). Au début de la relation,le disciple est tout entier composé de désirs du nefs. Le médecin et l'esclave doivent rester seuls.Le médecin fait en sorte qu'elle ne se rende compte de rien: il trouve qu'elle est amoureuse d'un orfèvre. L'orfèvre, ce sont les désirs du nefs.
Ainsi le nefs a-t-il ses désirs propres. Ce n'est pas l'ascension qu'il désire! Le médecin commence par s'occuper de ces désirs:l'orfèvre. Il promet à l'esclave de s'occuper de l'orfèvre , en échange il lui demande de se taire. 
💚
Deux ambassadeurs sont envoyés: 
- Ilim, le savoir, la connaissance
- Tefekkür, la réflexion profonde
L'orfèvre, grâce à ces deux ambassadeurs, comprend qu'il y a autre chose que les désirs ordinaires, et part en route vers le palais, rejoindre l'esclave
Le maître a donc amené l'âme et le nefs (avec ses désirs) face à face: pour la première fois, ils se retrouvent avec sincérité. Le nefs a une intention nouvelle. Le Padishah a une bonne disposition vis-à-vis du nefs. Il montre à l'orfèvre tout le trésor du palais, cela veut dire que l'âme montre au nefs toute la beauté de la Réalité. 
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Puis le médecin demande au Sultan de se retirer et d'accepter le mariage de l'orfèvre et de l'esclave. Cette âme est tellement amoureuse qu'elle accepte que le seul moyen de sauver l'esclave est de la rendre heureuse. Pendant six mois, ils sont restés dans le bonheur complet. "L'esclave a alors recouvré toute sa santé. Comment faut-il comprendre cela ? Ce nefs, possédant la raison partielle, est amoureux de lui-même. Şems-i Tebrizi  dit: "Quand tu cesseras d'être amoureux de toi-même, tu seras alors amoureux de ton Seigneur!". Oui, un être qui se présente devant un Maître est tout entier Nefs. Il est amoureux, idolâtre de son nefs. On ne peut montrer à un être humain sa propre imperfection, laideur, saleté. Pour y arriver, il faut y aller progressivement, en faisant vivre des épreuves. "Faire vomir faire voir la saleté qu'il y a à l'intérieur". Sinon, pourquoi notre Seigneur voudrait-il faire subir des épreuves à son serviteur? Donc, l'esclave est complètement éprise de son nefs. Il faut "marier le nefs avec ses désirs". Cela veut dire que les désirs sont comblés. Donc, six mois de satisfaction de ses désirs en conscience peut amener à une nouvelle étape ( le nombre six est un nombre important, le monde a été créé en six jours; les six mois sont à prendre au sens symbolique, il ne s'agit pas de compter les mois). 
Que faut-il voir dans ce passage de l'histoire ? Un être humain en assez de son nefs, il a reçu un savoir (ilim), il a réfléchit (Tefekkür), il a discriminé le vrai du faux, il a pris la décision d'aller vers un maître.  Il vient en présence d'un maître, maison ne peut directement lui faire faire l'ascension. Il faut le nourrir progressivement, sinon il se sauvera. Le maître essaye diverses choses pour voir où en est son disciple. ("marcher sur sa queue" et voir s'il est terrifié, le faire vomir...). Ce n'est pas facile. Il y a un verset, le verset 256 dans la sourate BAKARA; " Nulle contrainte en religion; désormais le Vrai a été distingué de l'illusion"; Désormais, la personne va prendre la décision. Mais on ne peut faire l'ascension d'un seul coup. C'est une affaire de coeur. L'être humain ira sur le chemin avec sa propre volonté. Verset: "Ne faites pas peur, faites aimer"; Notre Prophète est tellement triste de voir ceux qui n'entendent pas la Vérité. Mais notre Seigneur dit ceci à celui pour qui il a créé les mondes: "ô Mon Bien-Aimé, ton devoir est juste d'avertir"... 
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Le devoir du maître est d'informer, d'avertir; le devoir du disciple est d'écouter, et de vivre ce qui a été entendu. Le disciple, ou bien il voudra faire l'ascension de tout son coeur, ou bien il restera collé au sol. Ainsi un être humain vient-il à la voie, la Tarikat, sans être forcé. 
Puis le médecin a fait un sirop qui a rendu l'orfèvre laid, faible, et le fait mourir à petit feu. Cela veut dire que le maître a permis aux désirs de partir. Qu'est-ce que le sirop? C'est la connaissance de la vérité. Ce sirop de l'amour, le maître ne prive personne de cela..; Le maître a donc permis au disciple de ne pas être l'esclave de ses désirs mondains. Attention: le nefs ne meurt jamais! Dans l'histoire, lorsque l'orfèvre meurt, il dit en mourant: "moi, moi, moi".. Il dit "ce qui est vil en moi" meurt; il a bu le vin de l'amour. (On a reproché à Şefik Can Dede de traduire le mot "Vin" par "Vin" et de mettre en doute sa fidélité à la Charria! voyez quelle est la différence entre quelqu'un possédant la raison partielle, et quelqu'un possédant la raison Universelle! Selon lui cette personne (un journaliste) aurait trouvé un défaut à notre Şefik Can Dede! Or ce vin est bien ce qui rend ivre, il s'agit d'ivresse spirituelle!).
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L'orfèvre a dit en mourant: "ce qui m'arrive, cela arrivera sans aucun doute à celui qui m'a fait cela". Il critique son maître! 
je voudrais parler de Ebul Hasan Harâqânî, au sujet duquel Hz Mevlânâ 110 ans après dit qu'il n'a rien écrit qui n'ai été dit auparavant par lui... Un si Grand Sultan a donc dit: "J'ai été sûr de tout, mais je n'ai jamais pu être assuré des malheurs causés par le nefs!". On compare le nefs à un dragon à 7 têtes. Quand on en coupe une, il y en a 7 qui repoussent! Il y a cette histoire du Mesnevî où un homme est sûr d'avoir 'tué son nefs": il capture un dragon qui est gelé dans la montagne, et l'emmène fièrement dans la vallé pour l'exposer et en tirer quelque profit: le dragon se réveille alors et le tue en faisant un carnage autour de lui. Le Nefs ne meurt pas. Ce terme est faux. Car si il meurt, l'être humain meurt aussi. Il ne meurt pas, il est éduqué, il est sous contrôle.
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 L'orfèvre dit; "ce monde est comme une montagne, tout ce que tu fais te reviendra en écho", oui, c'est vrai que tout ce que nous faisons nous reviendra. Mais le Maître ne "tue" pas l'orfèvre, en fait il le rend vivant. Les amis de Dieu n'attendent rien en échange de ce qu'ils font. Ils n'ont besoin de rien. 
Il y a une autre histoire du Mesnevî: un homme tue sa mère et est emprisonné à cause de cela. On lui demande pourquoi il a tué sa ère, et il répond qu'elle avait commis un adultère. Mais, lui dit-on, il s'agit tout de même de ta mère, pourquoi ne lui as-tu pas pardonné? Ou bien pourquoi n'as-tu pas tué l'amant? L'homme répond qu'elle avait un nouvel amant tous les jours. Il a préféré tuer sa mère plutôt que des centaines d'autres hommes . Ici la mère, c'est le nefs. Pourquoi? Pas parce que la femme est d'une nature mauvaise faible, pécheresse et méprisable, comme certains veulent bien l’interpréter, mais parce que la mère met au monde sans cesse.C'est parce qu'elle met au monde qu'elle symbolise le nefs. 
Le nefs , tous les jours, a quelque chose à récriminer! Pour pouvoir vivre en sérénité, est-ce qu'une personne va tuer toutes les personnes autour d'elle? Il faut se tuer soi-même, c'est_à-dire tuer nos opinions et pensés au sujet de ces personnes,pour être en paix avec tout le monde. Ainsi la paix peut-elle s'installer.
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Nous avons terminé l'histoire de ce Padishah et de l'esclave. C'est en effet notre propre histoire.
Je voudrais parler maintenant de notre propre ascension, ou Miraç ..
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Il s'agit de raconter notre voyage intérieur, notre état intérieur...
Nous sommes dans le mois de "RECEB".. "R", comme "Rağbet etmek", désirer ardemment. "C"comme "Cemâlullah", le visage de Dieu, "B", comme "Birlik", l'Union... "Qui désire ardemment Dieu, pourra voir Son Visage". Il faut se vider de tout pour suivre un voie, une Tariqât; une Dergah, une Tekke, ce n'est qu'une école.. Tu vas rencontrer la vérité d'Allah! Il y a une immense peur à cela bien-sûr! Une école, tu dois d'abord y entrer.. puis une fois entré, tu peux y stagner, redoubler... c'est alors qu'on te montre la porte de derrière. Qu'est ce que cette porte ? C'est être en dehors du cœur du maître, ou bien qu'il y ait un voile entre le Maître et toi!
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Le mois de RECEB; ALLAH dit "le mois de RECEB est le mois qui m'est dédié". Le mois de ŞABAN (le deuxième mois des trois mois sacrés qui se suivent dont celui du Ramadan; le quatrième mois sacré est à part, au moment de la fête du Sacrifice) est celui de la communauté des  croyants. On y vit le Kandil de REGAïP. Il s'agit de vivre sa propre nuit de REGAïP, après avoir combattu pour ne pas adhérer à son nefs. L'ascension est une maturité spirituelle. Lorsque le nefs se soumet à l'âme, nous vivons cette ascension. L'âme a vu le Kandil du REGAïP. Pour cela l'être humain doit se vider de tout ce qui est le monde, à l'intérieur de lui. Le mois de ŞABAN est le mois du Prophète Muhammed.  Car c'est un Prophète conscient, qui se rend compte de ce qu'est la Vérité. Aimer notre Prophète, c'est se revêtir de ses nobles qualités morales. Nous avons compris que toutes les beautés sont en notre Prophète. Hz Mevlânâ dit; "Rien ne parvient en ce monde sans d'abord passer entre les mains du Prophète". C'est pour cela qu'on lui montre tant de respect et de dévotion. Tout comme les Maîtres, il est le représentant de Dieu sur terre. 
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Au mois de RECEB (RECEP), aimer Dieu, c'est croire en son Unicité. Nous avons aimé notre Seigneur (réalisé Son Unicité), et sommes entrés dans le mois de  ŞABAN . "Que Dieu vous aime et pardonne vos pêchés". Cela est lié au fait d'aimer le Prophète: il faut se revêtir de ses nobles traits de caractère. Cette nuit, il y aura tant et tant de prières... de repentirs. Il y a une parole très méditée chez les soufis: "Si Dieu ne le veut pas, toi tu ne le voudras pas". C'est une réflexion sur le degré d'Union avec Dieu (Tevhid). "Si Dieu ne le veut pas"... soit: "Si notre Prophète ne le veut pas". Quelle approche précieuse! Le mois de  ŞABAN  est un mois important. Le message est: "D'abord sois comme le prophète, afin que Dieu t'agrée." Sans être de la communauté de notre Prophète , on ne peut être un serviteur de Dieu.. voilà ce qu'il faut retenir. Voyons un peu cet Islam d'une autre façon que selon l'apparence et la forme. Venons-en à la vérité. Cela veut-il dire que nous n'allons pas prier? Oui, nous allons le faire, mais en contre-partie nous allons vivre ces qualités morales Muhammédiennes. Nous allons aussi jeûner, faire Oruç, c'est-à-dire se vider des désirs mondains. Alors seulement, nous parvenons à la nuit du Destin. le nefs est sacrifié. Cela a été inscrit sur les tablettes. C'est pour cela qu'il y a cette offrande de "sucre" (bonbons) à la fin du mois de Ramadan. Mais cela n'est pas terminé. Le nefs n'est pas encore (complètement) sacrifié. Il dit encore "moi". Il y a en suivant un autre sacrifice, la fête du sacrifice. La Sourate Bakara raconte à l'homme (ce qu'est) le Nefs. Le nefs est réellement sacrifié à ce moment là. 
💚
Niyazi Misrî dit : Aşk yolu belâlıdır her kârı cefâlıdır, Canından ümidin kes cânâna erem dersen..." Douloureuse est la voie de l'amour, torture est chacun de ses pas. Brise tout espoir en ton âme, si tu dis: J'atteindrai Le Bien Aimé."...
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samedi 22 avril 2017

De l'Advaïta Vedanta au Soufisme



De l'Advaïta Vedanta  au Soufisme



 / بِسْــــــــــــــــــمِ اﷲِالرَّحْمَنِ اارَّحِ


BismillahirRahmanirRahîm,

Au Nom de Dieu, le Tout Miséricordieux,
Le Tout Miséricorde,

Introduction

      Je me devais de tenter cet essai après avoir vécu au cours de mon parcours spirituel un changement de voie.. Tout  d'abord engagée auprès de mon premier maître Arnaud Desjardins, qui enseignait l'Advaita Vedanta, j'ai ensuite rencontré mon deuxième maître H. Nur Artiran,  de la voie Mevlevîe soufie de Hz Mevlânâ Djâlâl-Od-Dîn Rûmî.
Ce qui apparaît au premier abord comme un changement est en fait une continuité. Je voudrais faire "un point" sur mon parcours, un "pont" même,  cherchant à m'unifier et à ressentir qu'il n'y a "qu'une seule vérité".
J'espère aussi que cet exposé pourra permettre à des personnes de faire connaissance soit avec l'Advaïta Vedanta et l'Adhyatma Yoga,  soit avec  le Soufisme.

 1-Svâmi Prajnânpad et son enseignement,
Advaita Vedanta et Adhyatma Yoga.

 L'enseignement d'Arnaud Desjardins,  est celui de son maître Swamî Prajnanpâd. 
De formation scientifique et traditionnelle, cet homme exceptionnel a opéré une synthèse Orient-Occident ; il a éclairé par de nouvelles interprétations la tradition indienne la plus ancienne de l'Advaita Vedanta  et a utilisé la psychanalyse, qu'il a connu dès 1922 par les livres de Freud, pour lever les obstacles dus à l'histoire personnelle et permettre au disciple d'avancer sur le chemin spirituel. 

L’Advaita Vedānta
 est la forme la plus répandue de la philosophie du Vedānta. Advaita signifie littéralement « non deux » et se traduit le plus souvent par non-dualité, car il y a  non différenciation de l'individualité ou l'âme individuelle (jīvātman) et de la Totalité (Brahman) qui est neutre.  
L'enseignement pratique de Swami Prajnanpâd porte le nom d' 

        Adhyatma Yoga:   

Le  mot «Yoga» veut dire « union, joug ».
 Le Yoga est devenu, particulièrement en Occident, une discipline visant, par la méditation, l'ascèse morale et les exercices corporels, à réaliser l'unification de l'être humain dans ses aspects physique, psychique et spirituel.
 Cette «Union», c'est le souvenir de tous les instants entre l’âme individuelle et l’Âme Suprême.
Le mot "joug"évoque la soumission de l'ego à l’Âme Suprême. 

L' Adhyatma Yoga
signifie "le yoga en direction du Soi." Il fait partie du Jnana Yoga, "le Yoga de la connaissance". 
C'est par la connaissance de soi que l'on arrive à la connaissance du Soi, de l'Atma, de la Réalité Suprême. 
Le Soi, est à réaliser par la
 pratique de la Non-Dualité.
"Dire oui à ce qui est"
"Etre un avec"

Telles sont les phrases clés de l'enseignement de Swamî Prajnanpad et d'Arnaud Desjardins.
Par l'acceptation de ma souffrance, il n'y a plus "moi et ma souffrance" (la dualité).
"Il n'y a plus que la souffrance, et il ne reste plus personne pour souffrir."
"Il ne peut plus y avoir qu'un sentiment stable de paix, de béatitude, d'amour- L'amour réel qui est l'expression de la non-dualité"


Arnaud Desjardins, A la reherche du Soi, L'Atma p 107/ 108





 La Réalisation Ultime  

Les termes employés pour désigner cette réalisation ultime sont variés. En particulier, Arnaud Desjardins savait qu'il s’adressait à un public de croyants, de non-croyants, tous en recherche de la Vérité, mais tous différents. 
Aussi disait-il souvent:
 "La Réalité Suprême, l'Atma, La Vie Éternelle, Le Royaume des Cieux, Dieu, Allah, La Béatitude, ou La Plénitude... Appelez-la comme vous voudrez"
Il s'agit de désigner un même but, une même Réalité.


Le Chemin : Adhyatma Yoga, et Jnana Yoga 


Le chemin, lui, est différent selon les voies. Pourtant, il y a des composantes incontournables. 


La vigilance
L'acceptation


Mais la compréhension de la voie est essentielle. Ainsi ,
- le premier pilier
de la voie proposée par Swami Prâjnanpâd est

La Science du Vedanta ( Vedanta Vijnana).

"Swamîjî m'a dit un jour que l'Adhyatma Yoga était fondé sur quatre piliers: vedanta vijnana, manonasha, chitta shuddi et vasanakshaya. Vasanakshaya signifie érosion du désir, chitta shuddi, purification de la mémoire ,  manonasha, destruction du mental, et vedanta vijnana, science du vedanta."
 * Arnaud Desjardins Le Vedanta et l'inconscient ( p56)


Ce premier pilier indique que  cette voie,
le "Yoga de la connaissance",
"ne comprend en principe ni prière, ni culte, ni office, ni rite"
*  p 58
Le mot "connaissance " peut être mal compris,
"comme s'il s'agissait  d'une connaissance habituelle, celle que nous avons accumulée à l'école. Pourtant il s'agit bien d'une connaissance, (...) une connaissance de "Cela" qui une fois connu, fait que tout le reste est connu. Si, en tant que chimiste, nous connaissons le secret de l'eau, nous connaissons le secret des vagues sans exception (...). Ce Yoga de la connaissance, c'est celui de la connaissance de la Réalité", c'est-à-dire de Cela qui est en soi, qui ne dépend de rien d'autre que ssoi-même, qui n'a ni commencement ni fin. (...)"

* p 58


" Avoir des connaissances, en matière de Vedanta, ce n'est pas la Connaissance. La connaissance se confond avec l'être . Ce n'est pas une connaissance qu'on a, c'est une connaissance qu'on EST" 

* p59 

      La fonction qui nous permet d'approcher cette connaissance c'est la buddhi  (la vraie intelligence) et aussi ce qu'on appelle viveka, la discrimination.
La méthode en elle-même consiste clairement à se "dés-identifier" des pensées, des émotions, des sensations, qui sont des revêtements du Soi. En se posant la question "qui suis-je?"

- Trois autres pilliers:
Chitta Shuddi, la purification  de l'inconscient, Manonasha, la destruction du mental,  et Vazanakshaya, l'érosion du désir

" Le mental, c'est le fonctionnement du psychisme, par lequel nous vivons dans "notre" monde au lieu de vivre dans "le" monde . "
* p125
" Personne ne vit dans LE monde, chacun vit dans SON monde"
 C'est l'ego qui est en cause. L'ego s'approprie tout.
"Tout ce que nous approchons, que nous découvrons,nous le découvrons à travers notre ego. (...) vous pouvez considérer l'ego et le mental comme synonymes"

"L'ego vous suit partout. Il est toujours là avec son espérance: Est-ce que je vais y gagner quelque chose? (...) Il aime ou il n'aime pas"
*  p126
"L'effort que nous ferons pour sortir de notre monde nous amènera à mesurer ce qui rend notre tâche difficile, et vous serez naturellement amenés à comprendre qu'une grande part de ce qui vous maintient dans ce monde est enfoui dans l'inconscient"

* p 128
Ainsi la nécessité de Chitta Shuddi , la mise à jour de l'inconscient. Mais il ne s'agit pas d'une démarche psychothérapeutique, même si elle y ressemble. C'est bien une démarche spirituelle, dont le but est de voir la Réalité non déformée par le mental.
Donc ces deux aspects, destruction du mental, et purification de l'inconscient, sont étroitement liés.
"Manas", le mental: c'est "ce qui vous empêche de vivre ici et maintenant"
* p 134
Un des moyens les plus efficaces pour la destruction du mental c'est d'être inlassablement dans un effort de vigilance pour vivre l'instant présent. "Manas", le mental, c'est "le menteur", celui qui superpose une deuxième réalité à celle de l'instant présent, qui crée une dualité, on peut aussi l'appeler le "malin", le diviseur, le diable. 

Le mental se réfère au passé, ou bien se projette dans l'avenir. Vivre l'instant présent est non seulement la clé du bonheur, mais aussi une arme efficace pour se purifier, se nettoyer. 

Et l'érosion des désirs? Le quatrième pillier? Arnaud Desjardins explique que nos désirs , qui proviennent souvent de l'inconscient,font partie de "notre monde", et nous coupent de la réalité . Les mettre à jour, avec honnêteté, fait partie des efforts à faire sur le chemin. Pour les "neutraliser", il est possible de chercher à en accomplir certains, d'une manière consciente et dans le respect des autres. L'efficacité est plus grande si la démarche est consciente. Arnaud Desjardins parle d'"habilité". 
Le but est bien-sûr de toujours rester dans l'instant présent, qui est la seule réalité, de ne pas se projeter sur l'avenir ou rester dans le passé, avec des peurs et des attentes. 

"Dire oui à ce qui est"


La soumission, c'est la soumission à la réalité de l'instant présent, sans attente, sans peur. 

Bien-sûr en en venant à ce point comment ne pas évoquer l'Islam, qui veut dire littéralement "soumission"? 

Je pourrai encore beaucoup dire sur l'enseignement d'Arnaud Desjardins, mais je voudrais assez vite en venir au fil conducteur qui me mena vers le soufisme. 

2- L'amour... le  fil conducteur.

Je me souviens d'avoir posé une question à un des proches disciples d'Arnaud Desjardins: "Est-ce que , si je ressens de l'amour en moi, cela peut être un critère qui pourrait me faire sentir  que je suis bien dans l'acceptation?" 
La réponse fut "oui" ...
Accepter,"dire oui", c'est voir les choses d'une façon neutre. Mais cela ne veut pas dire sans amour :
"C'est neutre et cela me laisse neutre. Dès que cette neutralité est atteinte, apparaît le sentiment. Les émotions ont disparu, et apparaît ce que j'appelle, pour le distinguer des émotions, le sentiment, c'est-à-dire l'amour, la compréhension, la compassion." 

Il y a toutes sortes d'amour, à plein de niveaux différents. La langue française ne connaît qu'un seul mot pour désigner toutes ces formes d'amour. En grec ancien il y a trois mots qu'Arnaud Desjardins nous citait souvent.En arabe, il y en a, paraît-il  .. 100!
Tout en moi était mélangé.

Pour que je ressente un jour ce que pouvait être l'amour de Dieu, il m'a fallu traverser un long chemin de silence, où il n'y avait plus que Lui.

Cela arriva peu à peu, jusqu'à ce que je le vive comme une évidence.
C'est à ce moment là que je rencontrais mon deuxième maître, Hayat Nur Atıran. 

3- La question de la souffrance 

Avant d'en venir à un exposé du soufisme, de ce que j'en ai compris à travers mes faibles moyens, je voudrais évoquer un point qui m'avait  semblé au premier abord être abordé d'une façon contradictoire dans les deux voies spirituelles exposées ici. C'est la question de la souffrance. 

Dans la voie de l'Adhyatma Yoga, la question de la souffrance avait des aspects liés au mental. Le mental, l'ego, en refusant la réalité, crée une souffrance, qui est "la souffrance du refus". Bien-sûr l'ego n'y peut rien, il est "destiné" à vivre ainsi, c'est sa "nature". 
Etre heureux, c'est donc ne plus vivre dans le refus, dans cette souffrance de vivre dans la dualité.
Ce qu'Arnaud Desjardins arrivait très bien à nous démontrer, c'est que même l'ego aspirait à l'unité en voulant satisfaire le moindre de ses désirs. Un désir accompli efface la dualité entre la réalité et le rêve. Les deux se rejoignent, et nous "goûtons" véritablement à un moment d'unification, de béatitude, un véritable avant goût du paradis.
Comme cela ne dure pas, l'insatisfaction revient, et nous repartons sur le chemin de la quête de la satisfaction de nos désirs.
Un jour le désir nous apparaît tout simplement comme le désir de Dieu, d'union avec Dieu.

C'est une grâce divine, qui engendre de la gratitude. 

La souffrance a pour origine un refus de la réalité, certes, mais elle provient aussi  d'une immense et intense nostalgie de l'union avec le divin.

Le soufisme permet d'entretenir ce "dialogue amoureux", qui maintient la "plus fine pointe de notre âme" en état de vigilance constante, soutenue par le feu amoureux. 
Découvrir en nous cette perception amoureuse de la Réalité est une bénédiction. 

Arnaud Desjardins insistait beaucoup pour que nous osions ce geste amoureux:

"Il ne s'agit pas d'accepter la souffrance, il s'agit de choisir la souffrance, la souffrance qui est là."
*p 217
"Souvenez-vous: comment échapper à la fournaise des enfers ? - Sautez dans les flammes là où elles sont les plus hautes"
*p 237

Comment face à de telles phrases ne pas en venir à un chemin mystique, un chemin d'adoration intérieure de Dieu? 

La mystique Chrétienne rejoint la mystique Soufie, c'est un chemin amoureux vers le Bien-Aimé qui est Dieu:

Tard je t'ai aimée, Beauté si ancienne et si nouvelle, tard je t'ai aimée ! mais quoi ! Tu étais au-dedans de moi et j'étais, moi, en dehors de moi-même ! Et c'est au dehors que je te cherchais ; je me ruais dans ma laideur sur la grâce de tes créatures. Tu étais avec moi et je n'étais pas avec toi, retenu loin de toi par ces choses qui ne seraient point, si elles n'étaient en toi. Tu m'as appelé et ton cri a forcé ma surdité ; tu as brillé et ton éclat a chassé ma cécité ; tu as exhalé ton parfum, je l'ai respiré et voici que pour toi je soupire ; je t'ai goûtée et j'ai faim de toi, soif de toi ; tu m'as touché et j'ai brulé d'ardeur pour la paix que tu donnes.

Saint Augustin


J'ai découvert l'âme des âmes
qu'on vienne piller cette âme
je me suis détaché des pertes comme du gain
qu'on vienne piller mon bien.


Je me suis détaché de moi-même
j'ai déchiré le voile de mes yeux
et je suis parvenu au sein de l'Ami
qu'on vienne piller mes doutes.

Mon moi s'est détaché de moi-même
l'Ami a pris possession de tous mes biens
tout m'est ami , celui qui donne comme celui qui reçoit
qu'on vienne piller mes vers .

Je me suis désintéressé de tout
et j'ai volé vers l'Ami
je suis tombé devant la cour de l'amour
qu'on vienne piller mon oeuvre.

Las de la dualité
j'ai goûté au festin de l'Unité
j'ai bu le vin de souffrances
qu'on vienne piller mes remèdes.

C'est parce que mon être s'est mis en route
que l'Ami est venu vers nous
le cœur dévasté s'est illuminé
qu'on vienne piller mon univers

J'ai renoncé à tout désir
je suis las de l'été de l'hiver
j'ai rencontré le maître des jardins
qu'on vienne piller le mien

Comme tu dis bien Yunus
tu as mangé sucre et miel
j'ai trouvé le miel des miels
qu'on vienne piller ma ruche.

Yunus Emre

Mais que propose le soufisme de différent par rapport à la voie d'Arnaud Desjardins, et en particulier le soufisme de la voie Mevlevîe de Mevlânâ Djâlâl-Od- Dîn Rûmî? (Roumi)

4- Qu'est-ce que le soufisme?

Je ne peux que m'excuser à l'avance de prétendre répondre à une telle question. Je voudrais juste exposer ma modeste compréhension, pour unifier ma pensée, espérant que cette intention est juste et pourra être utile à d'autres.

Le soufisme est le cœur de l'Islam, qui est le troisième religion révélée par un prophète, Le Prophète Muhammed ( Sur lui le Salut et la Paix).

Au moment de la naissance de l'Islam, il n'y avait pas de soufisme. Les compagnons du Prophète  qui continuèrent à transmettre le message de l'Islam étaient toujours dans la pureté originelle de ce message, qui est avant tout un message d'amour.
C'est lorsque ce message a été peu à peu déformé et oublié que ceux qui restèrent "purs" se retrouvèrent, se regroupèrent autour d'un Maître pour continuer à transmettre cette lumière trouvée dans le cœur du Prophète Muhammed( S. S. P)

Le Prophète Muhammed est "le sceau des Prophètes", venu pour parachever les hautes qualités morales. Incarnant ces qualités, Le Prophète Muhammed sert d'exemple et est vénéré. C'est un acte d'adoration qui conduit à essayer de parvenir à ces hautes qualités morales. Elles ne peuvent venir qu'après un chemin de purification, de soumission, vécu dans le Souvenir de Dieu ( la vigilance), à chaque instant.

Le but Ultime est l'Union avec Dieu.

Je retrouve tout de suite à travers ces premières définitions les bases de la voie d'Arnaud Desjardins: le but, qui est de découvrir la Réalité Suprême, le chemin , qui est de se soumettre à la volonté divine, donc à "ce qui est", d'être dans le "non-deux", de se purifier aussi, par la vision de la vérité, par l'effacement de l'ego.


Le Coran, et les pratiques religieuses.

Le Saint Coran est la Parole même de Dieu. Pour un croyant, et un musulman, cela ne fait aucun doute. Il y a des niveaux de compréhensions différents  du Coran, qui font que sa lecture requiert l'aide d'un maître. Dans le Coran, comme dans toute chose, il ne faut pas s'attacher à la forme, à l'apparence. Le maître dit ce qu'il y a à comprendre au-delà des mots.

C'est le rôle des maîtres d'une lignée, et Hz Mevlânâ Djâlâl Od-dîn Rûmî est l'un de ceux qui ont su nous offrir cette guidance. A travers son oeuvre principale, le Mesnevî, ou le Mathnawî, Djâlâ-Od Dîn Rûmî a principalement commenté le Coran. A chaque page nous pouvons en découvrir un verset, commenté, illustré par des histoires.
Le niveau de compréhension du Mesnevî lui-même n'est pas accessible à tout le monde, et nécessite aussi d'être guidé par un Maître, dans la même lignée.

Ainsi en est-il de la très Estimée Hayat Nur Artiran qui a reçu la  charge de pouvoir commenter le Mesnevî, c'est-à dire d'enseigner la voie spirituelle de l'Islam au plus près de son essence. 

Les pratiques spirituelles associées au soufisme sont celles qui sont propres à tout musulman, et qui sont prescrites dans le Coran. Il s'agit des 5 piliers de l'Islam.  L'esprit de ces pratiques, leur intention, leur signification sont bien-sûr éclairées par la lumière des maîtres, mais en tout premier lieu par les Hadis (paroles) du Prophète Muhammed (S.S.P.).
Mais il y a aussi d'autres pratiques dans les voies soufies, appelées pratiques "surérogatoires", prescrites par le maître lui-même à son disciple. 

Toutes les voies soufies préconisent le "Dikr" , ou "Zikr", et c'est un point clef.
Celui-ci est accompagné par une pratique rituelle, corporelle, utilisant le souffle, la voix, la danse, le chant, les balancements, ou bien juste la récitation intérieure, en silence, des noms de Dieu. 

Tout est dans le souvenir de Dieu, d'Allah.
Se souvenir d'Allah c'est ne plus laisser l'ego mener le jeu. Ce qui s'en suit dépend de nos efforts, mais surtout de la grâce de Dieu.
Les conséquences du Zikr:  
L'attention est portée sur Dieu, non sur notre monde égotique.

Lorsque j'ai évoqué l'enseignement d'Arnaud Desjardins, j'ai montré l'importance de vivre dans un état de vigilance constant, de vivre dans l'instant présent, ici et maintenant. Et d'être sans cesse dans un état d'acceptation de la réalité. 
C'est tout-à-fait ce que je retrouve dans le soufisme.

Arnaud insistait sur "le regard témoin", observant ses pensées, pour ne pas être "emportées par elles". Ni par nos pensées, ni par nos émotions.
"Toutes les émotions proviennent de l'enfance",
disait Swâmî Prajnânpad. 
Un effort constant d'observation et de "dés-identification":  
"Je ne suis pas cette pensée, cette émotion"..

Avec la voie soufie j'ai découvert une autre façon de me positionner face à mes pensées. Cela reviendrait presque à les ignorer, mais ce n'est pas possible. Disons que cela revient à les relativiser face à  nos plus belles pensées, qui sont celles qui émanent de Dieu (et non de notre Nefs ou ego). 
On prend donc la démarche dans l'autre sens , en nous positionnant d'entrée de jeu comme des "serviteurs", des créatures soumises à leur Seigneur, Lui devant la vie, l'existence, la subsistance, et surtout notre vie éternelle, nous en venons ainsi à développer en nous des sentiments d'humilité, de gratitude, de contentement, de tolérance,  qui sont les "hautes qualités morales" incarnées par le Prophète Muhammed (S.S.P.).

L'attention est portée sur ce qui beau, noble, vrai. Ainsi l'esprit ne court-il pas le risque de s'attarder sur les innombrables défauts, imperfections, de l'être humain, sur ses conditionnements, sa "psychologie". 

Je note simplement une différence "d'approche" qui a eu de l'importance pour moi.

C'est comme de détourner son regard de ce qui est imparfait et non-noble, pour voir la beauté qui est en chacun de nous. En portant l'attention sur une chose, on l'amplifie. Le regard influence la chose regardée. Même des scientifiques ont démontré cela. 
Arrêter de regarder "ce qui ne va pas", c'est comme arrêter de mettre des bûches dans du feu, c'est éteindre ce feu.


       Hazreti Mevlânâ Rûmî dit ceci: 

Ô frère, ton être est à l’image de ta pensée, 
Pour le reste tu n’es que des os et des nerfs. 
Si ta pensée est une rose, tu es comme un parterre fleuri de roses
Mais si elle est  faite d’épines, tu n’es que ronces à brûler.

Voici comment H. Nur Artiran commente ces vers de Hz Mevlânâ :
(Emission de télévision turque ayant pour titre "L'Amour ressemble à un procès" , du nom de son premier livre):

"Dans les paroles de Hz Mevlânâ, il s'agit des pensées ayant trait au Divin, il s'agit d'être détenteur de pensées positives (Hüsnü zan). Les autres (formes de) pensées, qui ne sont pas positives (favorables), ce sont des qualités animales . Ceux qui n'ont pas de belles pensées, "il leur reste des os, de la chair et des poils" (dit-il), ceux qui n'ont pas l'état d'être "positif " (Hüsnü zan), ou bien ceux qui ont des pensées sans être dans cet état d'esprit favorable, sont dépeints comme ayant des qualités animales."

« Tout ce que nous sommes, est le résultat de ce que nous avons pensé. »  
dit Bouddha

La constante attention portée vers Dieu, l'Adoration , la Vénération, sont ce que nous pouvons vivre de plus heureux sur un chemin spirituel. Je pense que même des non-croyants peuvent le vivre en cultivant en eux un état de joie et de compassion ( bouddhistes). 
D'ailleurs cette Adoration, cette Vénération, ne vont pas sans cette joie,et cet état heureux.


J'ai trouvé avec bonheur dans cette voie soufie une voie pour éviter le piège de la plainte, à travers une soi-disante "connaissance de soi" qui menait à une "complaisance de soi" (je parle pour moi);
Je ne critique pas la voie d'Arnaud Desjardins, loin de là, je pense à lui avec tellement de gratitude.

Le rôle du Maître est tellement vital, essentiel. Malgré cette évidence montrée par l'exemple du Prophète Muhammed (S.S.P.), malgré l'exemple donné par mes deux maîtres , malgré l'injonction "soyez heureuse" donnée à trois reprises par trois maîtres sur mon chemin, je continuais de me plaindre.

Cette phrase " Sautez dans les flammes là où elles sont les plus hautes! ", qui me plaisait tant, l'ai-je appliquée en réalité ?

C'est l'amour intransigeant de mon deuxième maître Nur Artıran qui me permis de "choisir la souffrance", et donc de choisir d'être heureuse. Ce n'est qu'un premier pas, je ne peux que me sentir débutante sur la voie.


Allez avance, choisis pour toi la douleur de l'amour, choisis la douleur de l'amour, choisis la douleur de l'amour! Car pour retrouver le Bien-Aimé moi je ne connais pas d'autre remède. Ne rétrécie pas ton cœur, disant que tu n'as ni biens, ni possessions, ne t'attriste pas! Si jamais tu es sans peine et sans douleur, attriste-toi de cela, car sur la voie de Dieu être sans douleur est un fléau.

Hz Mevlânâ Djâlâl-Od-Dîn Rûmî
Rubai

Les efforts permettent de maintenir une attention constante à ce qui est beau. La beauté est aussi un élément très important dans cette voie,elle est retrouvée dans la pratique des arts, tels que la calligraphie, la peinture stylisée (motifs floraux ou autres), le marbrage, la musique... 

Puis ces efforts, emprunts d'humilité, permettent à Dieu de faire son oeuvre en nous. Etre comme de la terre pour que Dieu puisse semer une graine en nous. 

La grâce divine est possible, visible, tangible, concrète elle suscite l'émerveillement, et plus on y fait attention, plus on la voit.
Le critère qui nous permet d'avancer pas-à-pas, et qui ne pardonne pas, c'est l'amour. Tranchant comme une épée, face au visage du Bien-Aimé (et aussi celui du maître), l'amour fais reculer l'ego, le fait mourir à petit feu. Peu à peu, le cœur du disciple s'emplit d'amour, et le prouve par son ardeur à servir. Il n'a plus le choix. Il devient un esclave de l'amour. Un serviteur. On dit "kul", c'est-à-dire esclave.



Ainsi : L'amour ne souffre aucun manque d'amour


Etre sur la voie de l'amour ne donne pas le choix : ou il y a de l'amour, où on s'en va!  
C'est donc une voie radicale, directe. 
C'est le plus court chemin qui mène à Dieu.

Le premier livre de mon maître H. Nur Artıran s'intitule "L'amour ressemble à un procès". Ce titre est en fait un extrait d'un "beyit", ou distique, de l'oeuvre de Hz Mevlânâ Djâlâl-Od Dîn Rûmî , le Mesnevî (ou Mâthnawî). 
Voici une partie du distique : 

" L'amour ressemble à un procès. Les tourments (subis) en sont les témoins. As-tu jamais vu un procès se gagner sans témoins ? 
Je suis stupéfait devant celui qui s'enfuit par peur, alors qu'il s'efforce de trouver un bonheur intemporel "

(Traduction  de Éva de Vitray  Meyerovitch : "L'amour est comparable à un procès : subir de rudes traitements est comme la preuve : faute de preuves, on perd le procès. Je suis stupéfait devant celui qui recherche la pureté et qui au moment du polissage tremble d'être manié rudement " )

Pourquoi l'Amour ressemble-t-il à un procès?   

"Pour le comprendre, il faut revenir à l'origine de l'Amour, au point de commencement."
dit H. Nur Artıran (dans l'émission de télévision consacrée à ce thème).
(Nous citons très souvent )  le Verset 172 de la Sourate Araf , car il s'agit du Verset qui recueille  et (nous) rappelle toutes les responsabilités que nous avons dans ce monde, ainsi que les raisons de notre existence.
Voici comment  les grands Maîtres spirituels ont  présenté le Verset  172 de la Sourate Araf: Notre Seigneur a créé toutes les âmes, celles qui sont apparues et celles qui apparaîtront, puis il les a rassemblées, et leur a dit " Elestu Rabikül" : "Ne suis-Je pas votre Seigneur ?"
Puis toutes les âmes, passées et à venir, en répondant toutes ensemble "belî", ou "bela", "oui",  ont certifié (ratifié) que Notre Seigneur était leur Seigneur, et qu'elles en étaient bien le serviteur (kul) (la créature) .

Puis le verset continue ainsi: "Si nous avons conclu un tel pacte avec vous .. si nous vous avons demandé "Ne suis-Je pas votre seigneur", et que vous avez répondu "bela", c'est pour que vous ne disiez pas par la suite "Nous ne savions pas, nous étions dans une société ignorante, entre les mains d'une famille où se trouvaient des polythéistes, allez-Vous nous demander des choses que nous ne pouvions pas savoir ?".

Voici donc l'explication: Notre Seigneur dit : "J'ai obtenu de vous votre parole pour que vous ne Me disiez pas:" Nous ne savions pas, nous avons été élevés dans une société qui ne savait pas, allez-Vous nous demander des comptes alors que nous ne savions pas ?"
"Et maintenant Je vous demande: " ne suis-Je pas votre Seigneur?"

Et toutes les âmes ont répondu "beli", " Vous êtes notre Seigneur".

Maintenant ... nous allons passer à la dimension du soufisme (Pour le verset, tout a été dit)...

 L'Amour s'est manifesté à ce moment là,
pour la première fois.

Hz Mevlânâ, en racontant cet instant, dit: "Moi je suis encore dans l'ivresse de ce monde éternel. Ce n'est pas seulement moi... Si sur cette terre il y a une seule personne qui est dégrisée ( dé-saoulée), qui n'est pas ivre, alors je suis ( un homme) sans foi."
"Toutes les âmes, à ce moment-là, ont proclamé, manifesté (par une grande exclamation), la grande ivresse qu'elles ont vécu, et comment elles sont "tombées en Amour" de Notre Seigneur.
Et moi je suis dans cet Amour.
Si sur cette terre il y a une seule personne sobre, je suis un homme sans foi".

Ainsi, l'amour qui s'est manifesté à ce moment-là  au fils de l'homme était l'Amour spirituel ( divin) (= Aşk) 

Lors de la déclaration  "Ne suis-Je pas Votre Seigneur ?" (en répondant "Beli"), les âmes ont goûté pour la première fois
à cet Amour.
C'était un tel Amour, un tel sentiment, un tel état d'ivresse, que personne n'avait envie de faire d'objection.
C'est dans cet état (d'ivresse), que les êtres humains ont été envoyés dans ce monde (comme l'explique Hz Mevlânâ). 
Hz Mevlânâ dit aussi ceci:
"Nous, à ce moment, nous avons dit "Beli " (oui).
"Oui, Vous êtes notre Seigneur".
Or cela est une promesse (un engagement) "

Je ne vais pas retranscrire toute l'émission consacrée à ce sujet, ni recopier tout le chapitre du livre consacré lui aussi à ce sujet (et qui de plus est le titre du livre)..

L'amour divin dont il est question est ce que nous allons découvrir au travers des épreuves. 
Arnaud Desjardins racontait souvent cette histoire: une personne lui demande un jour:
"Comment peut-on progresser malgré les difficultés que nous rencontrons dans la vie?" Arnaud a répondu " Comment peut-on monter à l'étage malgré les marches d'escalier?"



C'est  une promesse que nous avons faite; c'est une promesse que Dieu nous fait. 

Une grande qualité est mise en avant: la patience.

Les mots semblent à ce niveau impuissants à tout cerner, comprendre. La lecture des distiques, des Gazels de Hz Mevlânâ nous offrent des enseignements précieux à travers  une poésie que le cœur seul peut comprendre. Le cœur est l'instrument de connaissance.

Nous avions évoqué dans l'enseignement d'Arnaud Desjardins le rôle de la vigilance, de l'observation, et de la discrimination. 
La place de la raison (Akıl) est tout  aussi importante dans l'Islam et le soufisme. Voici un Hadith (parole) du Prophète Muhammed (S.S.P.):
La patience est un trésor parmi les trésors du Paradis.
La plus haute des pratiques religieuses est de patienter.
Le plus grand malheur provient de n'avoir que peu de patience.
La moitié de la foi, c'est la patience, l'autre moitié, c'est la gratitude.(...) 

 La patience pousse la personne à se repentir...

Le repentir. (Tövbe etmek)

Le thème du repentir a été aussi un très important fil conducteur dans ma démarche spirituelle.
 Se repentir c'est "se retourner", se tourner vers soi, changer la direction du regard. L’œil qui voit ne regarde pas à l'extérieur mais à l'intérieur. C'est l’œil du cœur. Lorsque la personne se repend elle veut demander pardon, naturellement. Le croyant demande pardon à son Seigneur. Ce geste de demander la rémission des pêchés est tellement naturel qu'on ne le voit plus. On parle de culpabilité, de fausse humilité. Pourtant n'y a-t-il pas là la vraie marque d'un être humain? 

Le sujet est délicat et je me sens bien ignorante pour pouvoir le développer. 
Le repentir (avec son ressenti) est un fil conducteur qui m'a menée vers une idée très haute de la pureté. 
Les soufis qui portent une robe blanche (derviches tourneurs) ne supportent pas la moindre tache sur leur robe. 
Vivre cela au fond de soi n'est pas facile, mais c'est une grâce.

S'adresser à son  Seigneur, à son Créateur, pour demander la rémission des pêchés, quelle en est la portée dans le soufisme , et comment  cela peut-il être compris du point de vue de l'enseignement du Vedanta?

J'en arrive à un point clé de mon exposé.

Je voudrais redire ce que je disais en introduction: il n'y a qu'une seule Vérité, et celle-ci est appelée de différentes façons. Je voudrais  montrer cela avec mes très modestes moyens. Comme nous l'avons vu, "Advaita" veut dire "Non-dualité", et l'enseignement de Swami Prâjnanpâd était de ne  jamais oublier que la dualité ne pouvait pas exister. Donc, à chaque situation, à chaque moment de la vie, se souvenir de cette "Non-Dualité". 
En particulier, ne pas laisser les pensées et les émotions créer une seconde réalité (créer "un second"  veut dire créer "un problème!). 
Et si nous n'y arrivons pas, si nous ne le faisons pas, que nous arrive-t-il?

Nous perdons alors de vue La Vérité, Notre But Essentiel, Notre Espérance, Notre plus chère Espérance.

Le soufisme nous ramène à vivre dans l'urgence en montrant l’exigence qui est sous-tendue derrière chaque parole du Coran. 
Ainsi , le plus grand des péchés est-il appelé "Şirk" (Shirk). C'est le seul péché qui n'est pas pardonné. 
De quoi s'agit-t-il?

Il s'agit de l’associationnisme. D'associer à Dieu, à Allah (à la Vérité), autre chose que lui-même. Il s'agit aussi de l'idolâtrerie. D’idolâtrer des idoles. 

Je vais reprendre les paroles de H. Nur Artiran à ce sujet ( émission de télévision "Ab-I Hayat" sur les péchés):  

"Pourquoi est-ce le plus grand péché".. Car face à lui, il n'y a pas de plus grand péché. Le polythéisme est Le plus grand péché. Cependant, pour pouvoir exprimer dans son sens exact ce qu'est le polythéisme, il est utile de connaître l'opposé du polythéisme.. L'opposé du polythéisme, le contraire, est le monothéisme, l'Unicité (Tevhid); ce qui veut dire que tout ce qui sort de la croyance en l'Unicité est dans le domaine du polythéisme. L'Islam, dans son ensemble, est une façon de vivre s'appuyant sur la croyance en l'Unicité. 
Autrement dit,  l'Unicité = l'Islam. 

Puisque l'opposé du polythéisme est l'Unicité, je voudrais à nouveau parler de l'Unicité, et citer quelques phrases; L'Unicité c'est, comme nous le savons, dire "Lâ illahe illallah", en tant que mots, mais au delà de ces mots, il s'agit de ne s'appuyer sur rien d'autre qu'Allah, de n'être confiant qu'en Allah, de ne donner son cœur qu'à Allah, de ne pas être accroché à la forme et aux apparences, et,..de ne pas être un ignorant .. en s'accrochant aux causes, et en leur donnant raison. 

La croyance en l'Unicité, c'est vivre tout ce que nous avons à vivre dans l'Unité. C'est se souvenir de Notre Seigneur pour toutes nos actions, nos pensées et nos paroles.

Ainsi nous avons dit que l'Unicité, c'est de ne pas s'attacher aux formes et aux apparences. Et, voyant les causes, ne pas leur donner raison, et ne pas oublier.

Hz Mevlânâ dit dans un Distique du Mesnevî:

"Allah est Beau, Il aime les Beautés. Allah est pur (propre), Il aime les purs. Allah est sans forme et sans apparence. Il désire aussi que Ses serviteurs soient sans forme et sans apparence".

Si, nous autres, nous voulons être proches de Notre Seigneur, nous devons absolument être sans forme et sans apparence..

Ce qui veut dire que nous ne devons pas nous accrocher à la forme et à l'apparence.

Si nous faisons attention à tous les événements que nous vivons, (nous voyons qu') il y a toujours  quelqu'un derrière... et nous ne pensons jamais que la causalité véritable vient de la providence divine, de Notre Seigneur.

Cela aussi est l'un des plus grands péchés d’associationnisme . 

Ainsi nous avons dit qu'il ne faut pas s'attacher aux causes. 
Maintenant.. l’associationnisme, d'un autre point de vue, c'est adorer des idoles. C'est pour cela que l'opposé du polythéisme , c'est le monothéisme. 

L’associationnisme c'est adorer des idoles, le contraire du monothéisme...les personnes qui ne sont pas dans l'Unicité.. dans quelle position sont-elles? Elles adorent des idoles... 

Hz Mevlânâ dit dans un distique du Mesnevî Sherif:

"Qu'est-ce qu'adorer des idoles? "

Il répond à cela:

"Si toi, tu restes dans la forme et les apparences, si tu prends des décisions en regardant l'apparence extérieure des gens, alors tu adores des idoles"
(...)
La plus grande idole est la personne même de chaque individu. C'est le moi, l'ego.
(...)
L'une des significations de l'Unicité (Tevhid), est:

"Allah est UN".. Il s'agit d'accepter qu'Allah est UN.

Et pour accepter qu'Allah est UN, (...) si on veut s'unifier à Allah, cela ne fait pas UN..

Pour s'unifier à Allah...devant cette Unicité, (...) il faut soi-même n'être RIEN! 

Et Shems- Tebrizi Hazretleri dit ainsi:

" Toi qui t'attache à nous en disant Moi! Moi! Moi! 

Quelle est donc cette façon de dire

qu'Allah est UN ?" 

Puisque Allah est UN, puisque tu dis "Allahu Ekber", puisque tu ne tombes pas dans le dualisme (l’associationnisme), puisque tu n'adores pas d'idole, pourquoi ne lierais-tu pas ton cœur à rien d'autre que Allah ? Pour être digne de cela, pourquoi est-ce que tu ne mettrais pas de l'ordre dans ta vie?

Hz Mevlânâ continue ainsi :

"Ce corps est comme une lettre envoyée à Notre Seigneur. Du moins les états d'êtres que tu as eu et les gestes (actions)...

Avant tout, toi, lis cette lettre. Si tu as associé à Allah quelque chose, si tu as adoré des idoles, si tu as fait cela et que c'est dit dans ta lettre.. effaces tout cela et écris une nouvelle lettre."

Maintenant je voudrais citer ces paroles de H. Nur Artiran (toujours dans la même émission):

"Je me souviens que c'est dans la Sourate Furkan (Al Furqâne)  Verset 43 (que) Notre Seigneur Allah dit "Ne faites pas une divinité de vos ressentis qui vont et qui viennent, de vos ressentis passager (mortels, périssables, de ce monde)".
Qu'est-ce que cela veut dire ? Ne vous attachez pas à vos propres émotions et pensées autant qu'ils apparaissent". C'est pour cela que le  plus grand "Shirk" de l'être humain est son propre corps, ses propres ressentis et pensées. Nous autres, lorsque nous en restons à la forme et l'apparence des événements du jour, qu'ils soient extérieurs ou intérieurs, essayant d'appréhender (de comprendre) les événements d'après cette forme extérieure et cette apparence, si nous suivons ces pensées et ces ressentis, tombant dans la dualité, et si nous tombons dans cette dualité dans cette société, c'est alors l'excellence (le summum) de l'adoration d'idoles, et de l'associationnisme (shirk) ! "

Je ne peux aller plus loin dans cet exposé.
Les mots de mes deux maîtres et surtout du Coran et de Hz Mevlânâ sont tellement éloquents que je n'ai pas besoin d'en dire plus. 
"Etre un avec ", comme le disait Arnaud, c'est "N'être rien".. C'est le début du chemin sur la voie Mevlevîe Soufie, c'est le "premier stade". 
Or comment pouvons-nous à ce point désirer "N'être rien?" par quel miracle cela est-il possible? 
Par le miracle de l'amour. 
C'est la voie de l'amour qui m'a emportée, comme une vague qui a reflué emporte une brindille posée sur le  sable, et l'emmène vers l'océan.

Qu'Allah agrée cette modeste contribution à Son Oeuvre d'Amour.